Elections législatives, et l'Europe dans tout ça ?

Une période électorale d'une rare intensité vient de s'achever en France, avec un scrutin législatif inatendu succédant aux élections européennes du 9 juin. Les débats ont fait la part belle aux questions européennes, et la position de la France vis-à-vis de l'Union Européenne a compté parmi les points les plus clivants de cette campagne express. 

A l'issue du scrutin, quelles conséquences peut-on retenir du point de vue européen ? Quel rôle la nouvelle assemblée aura-t-elle à jouer dans les politiques européennes ? Alors que la France redécouvre le multipartisme, devrait-elle imiter ses partenaires européens pour éviter de devenir ingouvernable ?

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L'Europe, enjeux des élections françaises - Elections française, enjeux pour l'Europe

Les élections législatives en France ont été tout particulièrement observées dans le reste de l'Europe, avec parfois une certaine appréhension. En effet, la France êtant le deuxième pays européen le plus peuplé, la première puissance militaire de l'UE, et depuis des décénnies l'un des moteurs de l'UE, la voix de la France compte tout particulièrement au sein des institutions européennes, notamment au Conseil de l'UE auquel participe le gouvernement français. De fait, peu de grandes décisions peuvent être prises dans l'UE sans l'accord et le soutien du couple franco-allemand. D'où la crainte de certains acteurs de voir l'Europe en partie bloquée avec l'arrivée éventuelle à Matignon d'un gouvernement eurosceptique mené par le Rassemblement National. Celui-ci milite pour une forte limitation du poids de l'UE dans les affaires françaises, qualifié "d'ingérence" par l'extrême droite.

Avec l'arrivée en tête surprise du Nouveau Front Populaire suivi du parti présidentiel, ces inquétudes sont dans l'immédiat partiellement dissipées. Demeure néanmoins pour les partenaires européens une incertitude quant à la capacité de la France à constituer un gouvernement stable et politiquement fort en l'absence de majorité absolue dans un pays qui n'a guère fait l'expérience du multipartise depuis la IVème République.

Au sein même du NFP, les désaccords mis en sourdine pendant la campagne pourraient rapidement resurgir, notamment concernant l'Europe. Alors que le PS et les Ecologistes ont toujours soutenu un plus ample soutien militaire et financier à l’Ukraine, LFI et les Communistes se sont montrés plus ambivalents. Sur la question d'un éventuel élargissement européen, là aussi les opinions diffèrents entre l'aile gauche qui s'y opposerait en l'absence d'harmonisation fiscale et sociale, tandis que l'aile modérée y voit une "nécessité" géopolitique malgré la longueur du proccessus. Enfin, les division existe aussi en matière d'énergie et de nucléaire. En revanche, certains sujets européens soudent les partis de gauches, comme l'opposition au Pacte de Stabilité et de Croissance et la volonté de créer un nouvel impôt sur la fortune européen.

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La France peut-elle s'inspirer de ses voisins européens ?

Ce qui apparaît comme une situation inédite de retour au multipartisme en France est en réalité la norme pour nombre de pays européens. Dans la majorité de 27 Etats, les élections législatives au scrutin proportionnel à un tour sont le plus souvent dans une situation d'une absence de majorité dans leur parlement national, tandis que le scrutin à deux tours français avait jusqu'à présent donné un avantage certain aux plus grandes formations politiques.

Un rapide tour d'Europe permet de constater que la quasi totalité des Etats de l’UE sont aujourd’hui gouvernés par des coalitions, à l'exception de la Grèce, de Malte et de la France. Si l'exemple de nos voisins allemands est souvent le plus connu (avec une coalition actuellement composée des sociaux-démocrates, des verts et des libéraux), on peut ajouter que c'est également ainsi que les groupes parlementaires européens ont avancé au cours des dernières décennies, ce qui ne les a pas empêché de prendre des décisions de grande ampleur et cruciales pour l'avenir de l'UE. Si dans l'UE et dans les 24 autres Etats des forces politiques plus ou moins divergents sont parvenu à s'entendre pour gouverner conjointement, on est en droit d'assumer que cela pourrait être le cas en France également. Cela demanderait cependant une évolution importante dans la culture politique française, dont personne ne peut affirmer que les élus d'aujourd'hui y soient préparés. Les tractations qui se joueront dans les prochaines semaines et mois à l'Assemblée nationale seront particulièrement déterminantes en ce sens.

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Que deviennent les eurodéputés élus à l'Assemblée nationale ?

Certains des 81 eurodéputés français investis le 9 juin ont ensuite fait campagne pour les législatives. Deux d'entres eux, à savoir Sylvie Josserand et Gaëtan Dussausaye (RN) ont ainsi été élus à l'Assemblée nationale. Il seront remplacés au Parlement européen puisqu'il n'est pas permis de cumuler les deux mandats. 

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Point sur les prérogatives de l'Assemblée nationale en matière d'Europe

Bien que les parlements nationaux ne soient pas au coeur des décisions européennes, ils sont néanmoins amenés à s'exprimer et se prononcer sur de nombreux sujets. Ils vérifient notament que les actions menées par l'UE ne peuvent pas être menées plus efficacement à l'échelle nationale, ce qu'on appelle le contrôle de subsidiarité. Le Parlement assure la transposition des directives européennes en droit national, avec certaines adaptations relatives au context français. De plus, les députés ratifient certains traités, en particulier les révisions de traités européens, l'adhésion de nouveaux Etats membres et les accords commerciaux internationaux. Par ailleurs, la commission parlementaire dédiée aux Affaires européennes peut émettre des observations sur "tout document émanant d'une institution de l'Union européenne". Elle rend des avis positifs ou négatifs sur les propositions législatives européennes, soit environ 1000 projets d'actes européens par an. Le Parlement peut ainsi signifier au gouvernement la position qu'elle souhaite le voir défendre au Conseil de l'UE. Si cet avis ne contraint pas le gouvernement, celui-ci doit cependant rendre compte à l'Assemblée de ses prises de position européennes.

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